Article écrit par Thierry Blain, Fondateur et dirigeant de Kiné-Formations.
Changer notre regard pour transformer la relation thérapeutique
Et si le problème n’était pas le patient, mais notre façon de le regarder ?
- Avez-vous déjà pensé qu’un patient ne faisait « aucun effort »… puis découvert plus tard une histoire bouleversante derrière son silence ?
- Et si notre rôle ne se limitait pas à corriger un mouvement, mais à comprendre ce qui freine la volonté de changer ?
- Que se passerait-il si, au lieu de juger, on décidait d’écouter autrement… avec le cœur et pas seulement la tête ?
Il nous est tous arrivé, un jour, de penser que « ce patient ne veut pas s’en sortir », « il ne comprend rien », ou même plus brutalement, « il me fait perdre mon temps ». Et si cette pensée, plutôt qu’un constat objectif, était le signal d’un point de blocage… en nous ?
Car un fait demeure : malgré leurs réticences, les patients viennent. Ils prennent rendez-vous. Ils se déplacent. Et ils s’exposent. Cela, en soi, mérite déjà notre respect.
Ce qu’on appelle un “mauvais patient”
Le « mauvais patient », dans l’imaginaire collectif du soignant, c’est celui qui ne suit pas les recommandations, qui revient sans progrès, qui reste passif, qui se plaint beaucoup, ou qui semble ne rien faire pour aller mieux. Mais ce portrait ne dit rien de la réalité intérieure du patient. Il parle plutôt de notre frustration de soignant, face à une absence de changement visible.
Derrière ces comportements, il y a souvent des douleurs anciennes, physiques bien sûr, mais aussi sociales, morales, existentielles. Parfois, c’est un deuil, une peur sourde, une honte non verbalisée. La non-adhésion est alors une forme de protection.
Et c’est là que notre rôle commence.
De thérapeute à accompagnant du changement
Notre métier n’est pas seulement de « faire faire des exercices », ou d’appliquer des techniques. Il est de co-construire un chemin de transformation. Cela demande des outils, certes, mais surtout un état d’esprit.
L’un de ces outils est l’entretien motivationnel, une approche centrée sur la personne, développée par Miller et Rollnick dans les années 80. Il ne s’agit pas de convaincre, mais d’explorer, avec bienveillance, ce qui freine et ce qui motive. Des études montrent que cette approche améliore l’adhésion thérapeutique (Lundahl et al., 2010) et réduit l’ambivalence au changement.
Ne pas en tenir compte, c’est risquer de juger hâtivement un patient, au lieu de chercher ce qui, en lui, demande d’être entendu.
Se détendre… vraiment et respirer
Il est fréquent de demander à un patient de se détendre pour mieux mobiliser une zone, ou pour faciliter un travail respiratoire. Mais posons-nous la question à l’envers : sommes-nous, nous, détendus ?
Notre respiration, notre présence, notre état intérieur influence directement la relation. Ce que nous appelons “effet placebo” ou “effet relationnel” commence par notre propre régulation.
Des études sur les neurones miroirs et la synchronisation physiologique le confirment : la présence d’un soignant calme, régulé, empathique, favorise une meilleure réponse du patient (Decety & Fotopoulou, 2015).
Et si nous changions notre posture, pas le patient
Il n’y a pas de mauvais patients.
Il y a des êtres humains en souffrance, parfois maladroits, parfois méfiants, parfois silencieux.
Mais derrière chaque corps qui se présente, il y a un être humain, souvent fragile.
Et c’est à nous, kinésithérapeutes, d’accueillir chaque personne telle qu’elle est.
Avec des techniques, oui. Mais aussi avec du cœur, une écoute, un regard renouvelé.
Parce que parfois, le simple fait de ne pas être jugé est déjà un soin.
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